Willy Wauthier, un trazegnien mercenaire musical...

lundi 3 février 2020

 Willy Wauther, mercenaire musical...

En guise d'introduction...

Voici une dizaine d'année qu'eut lieu à la salle des fêtes de l'Hôtel de Ville de Trazegnies une exposition organisée par la Bibliothèque de Courcelles et intitulée "Courcelles Jazz".
Dimanche 01/09/1957 - Archives Willy Wauthier
Lors de la préparation de l'expo, je rencontre par hasard Jeannine et Willy Wauthier. En cours de conversation, j'apprends inopinément que Willy a été musicien de jazz dans les années 50-60.

Me voilà interloqué... Cela faisait une vingtaine d'année que je connais Willy et c'est la première fois que j'entends parler de son passé musical. J'avais bien lu un ou deux articles de journaux mentionnant le fait qu'il participait à des concours de musique classique d'accordéon en qualité de membre du jury sans me douter que lui-même jouait de cet instrument.

Tout de suite intéressé par la chose, je lui demande s'il peut prêter des documents pour l'expo à la bibliothèque. Réponse : "je ne sais pas si j'en ai gardé et dans l'affirmative, où, ils se trouvent" [sic]. Une voix dit alors : "moi, je sais".

C'est son épouse qui vient de parler et une chose étonnante me frappe : Jeannine regarde Willy de la même manière dont  elle devait le regarder quand elle fut séduite par notre fringant accordéoniste quelques années plus tôt.

C'est ainsi qu'une partie de l'expo "Courcelles Jazz" put être consacrée à Willy Wauthier.

Encore mille fois merci Jeannine.

Notice biographique

Willy Wauthier a toujours vécu à Trazegnies. Mais, il est est né par accident à Pont-à-Celles le mercredi 2 octobre 1935, jour de l'invasion de l’Éthiopie par les troupes de Mussolini.
Willy & Co à la Maison du Peuple de Trazegnies ? - Archives Willy Wauthier
Willy est le fils d'Edmond Wauthier et d'Henriette Régis[sic]. Après avoir fréquenté l'école communale des garçons et l’École moyenne de Trazegnies, il étudie l'ergonomie.
Il débute sa carrière professionnelle à l’Atelier central des Charbonnages de Monceau-Fontaines. Ensuite, il est engagé par la Société D'Ieteren à Bruxelles qui, a l'époque, fabrique des voitures Volkswagen, Porsche et Studebaker.

D'Ieteren doit s'agrandir et doit faire un choix quant à la production de voitures. C'est Willy qui conseillera à la firme de se séparer de Porsche.

En 1954-1955, Willy effectue son service militaire dans les transmissions à la 7e Cie TTr basée à Liège. Chef de section, il a sous ses ordres des vétérans de la Guerre de Corée. Son peloton s'occupe des transmissions entre l'O.T.A.N., le Congo, les Ministères de l'Intérieur et de la Défense.


Deux ans plus tard, le 26 septembre 1957, il convole en justes noces avec Jeannine Petit. Trois filles et un garçon viendrons illuminer et illuminent toujours leur union.

C'est vers cette époque que Willy est engagé par la firme aéronautique Boeing Company pour travailler aux U.S.A. Pour ce faire, Willy et Jeannine doivent se rendre une quinzaine de jours à Seattle afin de trouver un logement

Mais, un peu avant leur départ, Willy est convoqué à l'Ambassade des États-Unis à Bruxelles. Là, il lui est signifié que son contrat ne prendra pas effet car, le gouvernement américain n'a pas voté les subsides pour la construction d'un nouvel appareil.

Mais, qu'à cela ne tienne ! Dans le même temps, il décroche contrat pour participer à l'expédition du capitaine d'aviation Frank Bastin en Antarctique en 1958-59. Soit une période de 18 mois. Jeannine est enceinte de son premier enfant et ne souhaite pas être séparée de son mari pendant une si longue période. Après d'âpres discussions avec sa future épouse, Willy ne partira pas.

Mais, il retombe vite sur ses pieds en matière d'emploi. Il entre chez Caterpilar à Gosselies toujours pour s'occuper de gestion du travail et il y fait carrière
délaissant peu à peu la musique.
 

Mais, venons-en au sujet qui nous occupe ici : le musicien Willy Wauthier.

La musique que Willy aime, c'est le jazz et son instrument favori, l'accordéon. Instrument dont il apprendra à jouer avec l'accordéoniste Alfred Henry qui lui donne des cours privés.
Alfred Henry - Archives Willy Wauthier
Déjà vers l'âge de 12-13 ans, Willy joue dans les cafés. Selon les lieux, il se déplace à pied ou en vélo, accordéon au dos. Il participe aussi à de nombreux concours.

Cependant, Willy suit également une formation musicale classique. Dans un premier temps, il apprend le solfège à l'Académie de Musique de Courcelles. Au moment de choisir un instrument, il doit se rabattre sur la clarinette. En effet, l'accordéon n'est pas enseigné dans les écoles de musique car, jugé trop vulgaire.
 
Il se rappelle avoir marqué Raymond Degueldre, le directeur de l'Académie de Courcelles par l'excellence de ses résultats : 99% dans toutes les matières. Du jamais vu...
 
En parallèle, Willy apprend les percussions et le vibraphone au Conservatoire de Charleroi. Ensuite, il entre au Conservatoire de Mons pour apprendre l'harmonie et la composition.
 
Dans un soucis de perfectionnement, il prendra des cours d'harmonie chez Georges Legrand de Gosselies. 

Un de ses condisciples n'est autre que Raymond Hartéon de Souvret.
Raymond Hartéon jeune - Archives Jean-Marie Hartéon
Parallèlement, il continue à se produire. La carrière musicale de Willy est prolixe et difficile à structurer quant aux dates. C'est pourquoi, celle-ci vous est livrée ci-après "en vrac".

Après le Consevatoire de Mons, il met sur pied une grande formation de jazz. L'expérience sera de courte durée et Willy monte une formation beaucoup plus modeste. Le saxophoniste Robert Lequeux et le batteur Georges Hennequière en font partie.
N'ayant pas de nom "officiel", le groupe est renseigné sur des enregistrements de la firme de disques RONNEX sous l’appellation de "L'ensemble Willy Wauthier".

Disque RONNEX - Archives Willy Wauthier
Willy Wauthier et son ensemble ? - Archives Willy Wauthier

Cependant, Willy et ses musiciens sont appelés à aller jouer en Allemagne et ils leur faux un nom de scène. Le quintette prend alors le nom d'"Edy Lep", nom qui leur restera par la suite. 

Quintette "Edy Lep"- Archives Willy Wauthier
C'est sous ce nom qu'ils se produisent par la suite à Charleroi "Aux Caves de Gambrinus" à l'occasion lors du cabaret artistique "Images de Wallonie" ayant lieu dans le cadre du 10ème Salon des Arts ménagers. Nous sommes le vendredi 15 novembre 1963.

Quintette "Edy lep" - Archives Willy Wauthier
Également prévu au programme ce jour-là, le courcellois René Godeau ainsi que Claude et Daniel présentés comme des virtuoses du xylophone.

Willy est également comme beaucoup de musiciens un mercenaire et court le cachet. Dans les années 50-60, il est possible pour un musicien de jouer tous les jours de la semaine.

C'est ainsi qu'il est amené à jouer avec Dany-André et ses boys lors de bals et qu'il joue du vibraphone sur un des enregistrements de la chanteuse de l'orchestre, Irène Courcel.

Irène Courcel et Dany-André - Archives Irène Courcel
 
Enregistrement où Willy joue du vibraphone - Document Luc Heuchon
Un jour, alors qu'il se trouve dans les locaux des disques RONNEX, il croise Salvatore Adamo venu pour l'enregistrement d'un disque. En sortant, celui-ci dit dans le creux de l'oreille de Willy de ne pas signer de contrat avec la firme car, les conditions sont malhonnêtes.

Pour Willy, c'est trop tard. Il est déjà "mains et pieds liés". En effet, il avait déjà signé un contrat comme musicien de studio.

Souvent, Willy remplace l'accordéoniste-pianiste souvrétois Ernest Cordier, membre de l'orchestre du Casino de Knokke. Il lui arrive également de jouer ailleurs en Flandre et pour ce faire, lui et les autres musiciens se déplacent en train avec leurs instruments.

Un jour, Willy et des musiciens gouytois doivent se produire à Anvers. Leur contre-bassiste est indisponible et est remplacé par un musicien résidant à Charleroi. Cette fois, ils bénéficient d'une voiture 4 CV Renault. Les quatre musiciens s'y entassent vaille que vaille avec leurs instruments et installent la grosse caisse sur le toit.

Au retour, ils reconduisent le bassiste à Charleroi et constatent qu'ils ont perdu la grosse caisse. Ils rebroussent chemin à faible allure en scrutant la route à la recherche de l'instrument. Ils la retrouvent à Anvers.

En outre, Willy se produit lors de ducasses. C'est ainsi qu'il joue pendant les 15 jours de la foire de Courcelles au café jouxtant le Cinéma Royal, les samedi, dimanche et mercredi. Il se produit accompagné soit d'un bassiste ou d'un batteur.



Précisons que Willy ne joue que la musique qu'il aime : le JAZZ. Un jazz "Old School" : Louis Armstrong, Sidney Bechett, Ella Fitzgerald, ...

 
Il accompagne les "Anne Sisters" à leurs débuts. C'est ainsi qu'il fera la connaissance du futur époux de Connie Hill, "Big" Jim Heremant, fondateur du "Big Jim's Ragtime Band". Ce dernier l'incitera à tâter de la basse. Mais, Willy n'accrochera pas à l'instrument.

Connie Hill, Big Jim, Marie-Jo et Jacques Defossez - Archives Pascal Walraevens
Pendant tout un temps, il lui arrive aussi de jouer régulièrement, avec des groupes à géométrie variable, à des soirées dansantes organisées par la communauté juive de Charleroi. Ces soirées ont toujours lieu un jour de semaine de 20 à 24 heures "dans une ambiance du tonnerre".

A Charleroi, il a même joué dans un caboulot "Le Chat noir" et un autre troquet tenu par un courcellois dénommé Devos, horticulteur de son état.

Signalons également qu'il a également collaboré avec un groupe de musique "exotique", "Les Chakachas". Le groupe était notament composé d'une chanteuse espagnole métisse et de deux musiciens de Marchienne-au-Pont.


Et, c'est Willy et non Raymond Hartéon qui a été le dernier accordéoniste du chanteur carolo Bob Dechamps.

Signalons aussi que Willy a écrit des chansons restées inédites à ce jour et qu'il fut également arrangeur et harmoniste.

Et, il ne faut pas oublier qu'après avoir consacré une partie de sa vie à la musique, il a créé le club philatélique de Trazegnies "Traphila" en 1977 dont il fut le président jusqu'à la dissolution du club en décembre 2017 faute de repreneur.

Willy fut également très actif dans le secteur des personnes âgées en présidant le mouvement social des Ainés"ENEO" jusqu'à sa dissolution le 14 décembre 2018. En subsiste la section "Thraso" qui édite, vaille que vaille, une petite revue  consacrée à l'histoire locale de Trazegnies.

Source biographique


Interview de Willy Wauthier / Luc Heuchon en août 2019

Alain Richir et Luc Heuchon
Reproduction partielle autorisée à condition de citer la source.
Contact : alain.luc.richir.heuchon2@gmail.com 





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